La méthodologie d’accompagnement innovante de Tous Covoitureurs ! : expérimentation sur les parcours bénéficiaires

Tous Covoitureurs ! s’appuie sur une méthodologie d’accompagnement innovante et expérimentale élaborée dans de le cadre du programme CEE par Xavier Brisbois, chercheur associé au LVMT et au LIRTES et expert des processus de changement de comportement de mobilité. Cette nouvelle méthodologie d’accompagnement représente une innovation majeure pour le covoiturage courte distance où de nombreux freins psycho-sociaux restent à lever (lire l’État de l’Art sur le covoiturage domicile-travail).

Tous Covoitureurs ! publie les deux nouveaux protocoles utilisés dans le cadre des déploiements du programme.

Une partie du programme de recherche de Tous Covoitureurs ! consiste en effet à envisager la manière dont l’opérateur de covoiturage mobilise et fait participer les entreprises bénéficaires pour amener le service aux utilisateurs finaux. Dans ce but, une étude expérimentale est menée pour comparer les effets sur le terrain des pratiques réelles, de trois protocoles d’accompagnement : le protocole existant, le protocole Zaïbatsu, et le protocole Dé-guidé. Des entreprises ont été guidées selon ces trois protocoles et nous mesurons au fil du déploiement les résultats sur différentes dimensions, et notamment le nombre de covoiturages.

Protocole “Zaïbatsu”

Le protocole Zaïbatsu envisage les usagers d’un service de covoiturage en tant qu’ils sont avant tout des salariés de l’employeur bénéficiaire. 

Ce parcours bénéficiaire vise à changer l’approche marketing qui essaye essentiellement de de “vendre” un service aux employés, pour s’adresser à des collaborateurs dont les déplacements ont pour but d’aller au travail ou d’en revenir. Il s’agit d’un enjeu d’employeur, qui vise à mobiliser les collaborateurs pour le bénéfice de l’entreprise comme des salariés qui y travaillent.

Cela implique de mobiliser la hiérarchie, de situer les échanges (ateliers notamment) au sein des activités professionnelles, de considérer les covoitureurs avant tout comme des collègues, d’envisager que le travail puisse s’adapter aux déplacements et les déplacements au travail, etc.

Cette approche consiste en pratique en une manière spécifique d’amener les interlocuteurs de l’opérateur de covoiturage à considérer le service et par voie de conséquence à construire dans l’esprit des utilisateurs finaux une perception du service comme une option cohérente et pertinente d’aller au travail et de fonctionner avec le collectif professionnel plutôt que comme une offre commerciale personnelle. 

Principales étapes du projet

M – 1 : Négociation / pré-adhésion

  • Présentation du projet : un service à l’entreprise pour améliorer la mobilité des salariés
  • Le futur bénéficiaire doit adhérer au projet et le faire signer/valider en présence d’un dirigeant

M : Définition du plan d’actions

  • Réunion de cadrage et mobilisation des ressources internes
  • Réunion de mobilisation des managers
  • Validation des actions à exécuter

M + 1 : Lancement

  • Déroulé des actions digitales et/ou physiques définies dans le contexte du fonctionnement de l’entreprise
  • Les ateliers sont transformés en plusieurs grandes réunions d’équipes où les salariés sont invités par leur management

M à M + 4 : Suivi projet

  • Points mensuels avec réadaptation des actions si besoin
  • Evaluation de l’impact sur l’entreprise
  • Bilan de fin de programme

Objectifs de l’étape de pré-adhésion

  • Valider les besoins et les attentes de l’employeur, en particulier sur les enjeux de mobilité pour l’entreprise (gestion du stationnement, mais aussi accessibilité des sites, horaires décalés, salaires, etc.).
  • Identifier les processus internes liés à la mobilité et la perception du sujet par les managers (existence de réunions dédiées dans lesquelles intervenir).
  • Exposer le service sous l’angle de ses bénéfices pour l’entreprise (impact sur la satisfaction des salariés notamment).
  • Faire voir au dirigeant que la mobilité domicile-travail fait partie de la journée de travail du collaborateur. Il s’agit d’un sujet de management.
  • Obtenir l’engagement de la part d’un représentant de la direction que le projet sera présenté en réunion de managers (d’abord haut niveau, plus middle management si grandes structures).
  • Accompagner la transmission de cet engagement à l’équipe projet et au consultant.

Objectifs de la définition du plan d’action et de la mise en oeuvre

  • Concevoir un plan d’actions propice à faire entrer l’usage du covoiturage dans les pratiques de mobilité des salariés.
  • Appuyer cet usage sur le fonctionnement de l’entreprise et mobiliser le soutien de la hiérarchie.
  • Amener le covoiturage aux usagers finaux par l’intermédiaire de leurs managers, eux-mêmes soutenus par la direction et poussés par les RH. Ceci doit se voir et être perçu comme un projet de l’entreprise pour elle-même et au bénéfice de ses salariés.
  • Exposer les enjeux internes (gestion du stationnement, accessibilité des sites, horaires décalés, coûts pour les salariés, etc.).
  • Parler ouvertement de la prise en main du sujet par la direction et de l’enjeu managérial.
  • Exposer le projet du programme Tous Covoitureurs ! sous l’angle de ses bénéfices pour l’entreprise et pour les salariés.
  • Montrer que le programme et l’entreprise sont conscients que la mobilité domicile-travail fait partie de la journée de travail du collaborateur.
  • Les managers sont ceux qui informent les salariés  (en réunion d’équipe, ou en dernier recours par un message du manager) de l’existence de l’offre et les invitent à une réunion de présentation, qui sera transversale, ou par grands groupes de salariés.
  • Laisser entendre aux salariés qu’ils doivent se poser la question d’utiliser le service. Ils ne sont pas obligés de le faire, mais il est attendu d’eux qu’ils se posent sérieusement la question, c’est un enjeu professionnel (et aussi personnel bien évidemment).

Protocole “Dé-guidé”

Le protocole Dé-guidé repose sur l’idée que pour être impliquée, une équipe projet doit se sentir responsable du résultat.

Ce parcours vise à construire une bonne implication des équipes projets. Implication qui est une condition majeure du succès des projets de covoiturage. Il s’agit ici d’éviter le pilotage très directif des bénéficiaires pour aller vers un moindre guidage (d’où le nom) et leur laisser de la latitude de décision et surtout de proposition. 

L’idée de fond est qu’un guidage trop fort réduit l’implication des personnes qui se sentent être de simples exécutants. Pour qu’ils s’impliquent, il faut plusieurs éléments. Au départ un engagement clair et explicite en toute connaissance de cause. Ensuite, il faut que les interactions avec les consultants les laissent responsables de leurs actions. Il faut qu’ils en soient à l’origine et cela dans un contexte de liberté de choix, même si les consultants valident, conseillent ou proposent. Il s’agit de les accompagner dans leur propre cheminement, plutôt que de les pousser pour qu’ils suivent un processus défini par avance et sans eux.

A priori, la condition du succès est de bien construire le ressenti que si la responsabilité du résultat repose sur l’équipe projet, il est naturel qu’elle soit l’acteur principal de sa mise en œuvre. L’équipe du programme aide de son mieux, elle apporte son expertise et son expérience, mais seule, elle ne peut rien faire.  

Ce processus a de nombreux points communs avec le procotole Zaïbatsu, mais sans la composante de viser à toucher les salariés. Il s’agit ici aussi de mobiliser la hiérarchie au départ pour que l’implication de l’équipe projet soit un point explicite de l’accord validé par l’étape de signature. Ensuite, il s’agit surtout d’éviter d’être directif pour privilégier une posture d’écoute et de conseil, avec validation des idées et possibilité de véto.

Principales étapes du projet

Pré-adhésion

  • Posture d’écoute initiale 
  • Questions sur l’implication potentielle du bénéficiaire (Com pourra aider ? RH motivée ? Management intéressé ?)
  • Faire exprimer à l’interlocuteur l’utilité perçue du projet, les raisons, sa vision du covoiturage et l’usage supposé par les salariés.
  • Faire participer un dirigeant : réunion de présentation (co-animée par le chargé de projet) et validation.

Passation conseil et réunion de cadrage

  • Il s’agit ici d’une part de bien relayer l’engagement pris à l’adhésion et d’autre part de mener la réunion de cadrage.
  • Ecouter d’abord, questionner, puis exposer ce qui se fait habituellement.
  • Demander à l’équipe projet de réaliser un trajet.

Conseil : réunion des « ressources internes »

  • Mobiliser une équipe chez le bénéficiaire (com, RH, RSE) pour faire une réunion, ils réfléchissent et proposent une stratégie et des actions.
  • Le consultant recadre, reformule, conseille et valide (en faisant des récapitulations qui introduisent des modifications l’air de rien).

Plan de communication et ateliers

  • Ensuite l’équipe projet finalise avec l’assistance du consultant si besoin et sous son suivi attentif pour que tout aille bien au bout.

Points de suivi à long terme

  • L’équipe projet propose l’ordre du jour, le consultant complète/valide, et mène l’échange une fois l’ODJ calé.

Objectifs de l’étape de pré-adhésion

  • Valider les besoins et les attentes de l’employeur, en particulier sur les enjeux de mobilité pour l’entreprise (gestion du stationnement, mais aussi accessibilité des sites, horaires décalés, salaires, etc.).
  • Identifier les processus internes liés à la mobilité et la perception du sujet par la direction.
  • Exposer le service sous l’angle de ses bénéfices pour l’entreprise (impact sur la satisfaction des salariés notamment).
  • Faire voir au dirigeant que la mobilité domicile-travail fait partie de la journée de travail du collaborateur. Il s’agit d’un sujet de management.
  • Obtenir l’engagement de la part d’un représentant de la direction que le projet sera considéré comme un enjeu de l’entreprise et que l’équipe projet sera soutenue.
  • Accompagner la transmission de cet engagement à l’équipe projet et au consultant.

Objectifs de la définition du plan d’action et de la mise en oeuvre

  • On commence par écouter et comprendre, puis on reformule et on apporte le programme. Ça se traduit en pratique dans chaque échange, l’idée est que les équipes projets soient en charge du projet tandis que l’équipe du programme est en soutien. Contrairement à une situation où l’opérateur demande des actions et l’équipe projet exécute. C’est leur projet ! On va les aider à le réussir.
  • Rendre saillants les enjeux internes (gestion du stationnement, accessibilité des sites, horaires décalés, coûts pour les salariés, etc.) et externes (congestion, climat, etc.) pour étayer l’implication de l’équipe projet. Le projet a du sens et sert l’intérêt de l’entreprise comme des salariés et de la société…
  • Aider à la conception d’un plan d’actions propice à faire entrer l’usage du covoiturage dans les pratiques de mobilité des salariés. Le plan d’action ne sera pas forcément différent de l’habitude, mais devra émerger sur la base des propositions de l’équipe projet.
  • Insérer cet usage dans les pratiques propres à l’entreprise grâce à l’expertise interne de l’équipe projet et à sa légitimité pour faire évoluer les pratiques au bénéfice de l’entreprise.
  • Aider l’équipe projet à amener le produit aux usagers finaux.
  • Parler ouvertement de l’implication de l’équipe projet et des partenaires internes. C’est un projet transversal à l’entreprise et soutenu par la direction, il est légitime de solliciter l’appui de tous en interne et cela fait toute la différence pour la réussite du projet.
  • Valoriser le projet et l’équipe projet aux yeux des utilisateurs et des acteurs intéressés en interne.